Citations

«Il faut toujours faire confiance aux scénaristes qui lisent.» Alessandro Baricco. Une certaine vision du monde.

lundi 28 mai 2012

Festival de bande dessinée de Québec


Voici le billet que je voulais écrire à mon retour du vingt-cinquième Festival de la bande dessinée de Québec et que je n’ai pas eu le temps d’écrire pour cause d’injonctionnite aigüe.

Comme toujours, ce festival fut très enrichissant. Beaucoup de livres, beaucoup de bandes dessinées, mais surtout, beaucoup de rencontres agréables et stimulantes. Le milieu de la bande dessinée québécoise est rempli de gens intéressants et sympathiques.  Merci et félicitations à toute l’équipe d’organisateurs. J’ai bien hâte au vingt-sixième.

Mais j’étais un peu fatigué à mon retour. Il faut dire que je venais de passer 32 heures en 3 jours dans un kiosque à faire la promotion du programme en bande dessinée de l’université. Merci à Miguel Bouchard et Estelle Bachelard de m’avoir parfois remplacé afin que je puisse me sustenter.

Je suis revenu à minuit le dimanche soir, à temps pour débuter notre première semaine d’injonction à l’université.

Et on remet cela cette fin de semaine. Ce vendredi débute le premier Festival de bande dessinée de Montréal.

Mais, à mon retour de Québec en avril dernier, ma voiture de location m’a fait un petit clin d’œil. J'avais mis le compteur à 0 en quittant Gatineau le jeudi matin. Cette photo a été prise dans mon stationnement à la maison le lundi matin. Après tout, la bande dessinée, c’est le neuvième art ! 


samedi 26 mai 2012

Je prête serment !



 Laurent Proulx, premier injonctionniste de sa majesté la marchandisation du savoir a écrit ceci sur le compte twitter de ma collègue Stéphanie Demers :

«Je ne discute pas avec ceux qui trahissent un serment. Vous êtes un foncrionnaire du mels, votre attitude est innaceptable.» [sic]

Ce message m’interpelle, évidemment. J’aimerais lui signaler que les professeurs d’université n’ont pas à prêter serment. Du moins, moi je ne l’ai jamais fait. Où plutôt, oui. Je prête serment au début de chaque année universitaire. Je prête serment à mes étudiantes et à mes étudiants. Je leur jure de partager mes connaissances, d’ouvrir leurs horizons et, surtout, de développer leur esprit critique.

En ce sens, la session n’a pas été suspendue.  C’est seulement la salle de classe qui a été agrandie et qui occupe maintenant tout le territoire de la province.

Quant à la deuxième partie de la citation de Francis Proulx, non, je ne suis pas un fonctionnaire du MELS (Ministère de l’Éducation, des loisirs et du sport).

Voici une citation tirée du texte de Christian Rioux dans Le Devoir du 25 mai 2012. Elle est extraite du livre de Simon Leys, Le studio de l’inutilité :

«En Angleterre, un fringant ministre de l’Éducation qui était venu rencontrer le corps professoral d’un établissement plus que centenaire commença son discours en saluant les employés de l’université. Un professeur l’interrompt aussitôt : «Excusez-moi, Monsieur le ministre, nous ne sommes pas les employés de l’université, nous sommes l’université«!

 Le débat est plus large que la question des droits de scolarité. C’est la philosophie même du rôle de l’université, des professeurs et des étudiants qui trouve écho dans le bruit des casseroles que l’on entend un peu partout ces derniers jours.

Et pour terminer aujourd’hui sur ma vision de l’université, vision que ne date pas du début de la grève, une citation avec laquelle j’avais inauguré mon blogue en janvier 2010. Elle est tirée du livre d’Aline Giroux, Le pacte faustien de l’université :

«À ceux qui pensent qu’avec une discipline plus stricte les jeunes pourraient acquérir plus de connaissances, Schleiemacher répond que le but des études universitaires n’est pas d’acquérir une masse de connaissances, mais bien d’«éveiller chez les jeunes […] une vie toute nouvelle, un esprit supérieur et scientifique. Or cet éveil suppose, comme condition nécessaire, un climat de pleine liberté d’esprit.»
On peut également lire «Le devoir de philosophie» dans Le Devoir d’aujourd’hui portant sur John Rawls et écrit par le professeur de philosophie de l’Université de Montréal, Michel Seymour.

Bonne fin de session à tous mes étudiantes et étudiants.

mardi 22 mai 2012

Debout !




«Le rôle des étudiants consiste à rechercher la vérité révélée en faisant preuve de dévouement et d’ardeur, mais surtout de soumission. «Nous savons que cela vaut la peine de nous mettre à genoux. À genoux, nous sommes plus forts que debout. À genoux, nous sentons que nous dominons le monde. Quoi de plus désirable pour des jeunes, de plus noble pour des universitaires.»

Cette citation provient du Carabin du 6 décembre 1941. Elle est citée dans l’ouvrage de Jean-Philippe Warren, Une douce anarchie, page 24.

Aujourd’hui, le mouvement étudiant refuse de se mettre à genoux.

En 1958, ils se sont aussi mis debout. Trois leaders étudiants (deux gars, une fille) sont restés debout à chaque jour pour obtenir une rencontre avec Duplessis, rencontre qui n’eut jamais lieu. 

À la fin des années 1960, les étudiants se sont levés. Si vous trouvez que le mouvement est violent aujourd’hui, voici un texte publié durant ces années : «Étudiants, vous êtes des imbéciles impuissants, cela vous le resterez tant que vous n’aurez pas : cassé la gueule à vos profs; craché sur la famille; foutu le feu au cégep» (Anonyme. Cité par Jean-Philippe Warren, Une douce anarchie, page 209.)

Les étudiants se sont tenus debout en 1983 et ils ont réussi à faire adopter une loi sur la reconnaissance des associations étudiantes.

J’étais debout en 1990 en tant qu’étudiant. Je l’étais en 2005 en tant que professeur. Et je le suis encore aujourd’hui.

Je crois au mouvement étudiant et me battrai pour défendre leurs droits. Mon carré rouge signifiait, au début, que j’étais contre la hausse des frais de scolarité. Aujourd’hui, il dit que je reconnais la légitimité du mouvement et des associations étudiantes. C’est une force nécessaire.

Quand je suis arrivé à l’Uqo en tant que professeur en 1999, les étudiants en arts n’avaient pas d’association étudiante. J’ai travaillé avec des étudiants afin de constituer cette association. Ce fut long et pénible. C’est complexe. Et il a fallu nous y reprendre à plusieurs fois. L’ironie, c’est que quand cette association (la RÉÉÉMI) a été reconnue, j’étais rendu directeur de l’École. Et leur première action aura été de se mobiliser pour renverser une décision que j’avais prise. Nous nous sommes assis et nous avons trouvé un compromis.

Je ne désobéis pas pour la question de la hausse des frais de scolarité. Je suis toujours contre, bien sûr. J’ai des arguments à ce sujet et j’écoute les arguments contraires. Certains sont intéressants et nous devons en prendre compte. Mais quand je fais la synthèse de tout cela, je demeure convaincu que la meilleure chose pour notre système d’éducation demeure la gratuite scolaire.

Mais étouffer le mouvement étudiant, cela je ne peux le concevoir.

Et je resterai debout !

dimanche 20 mai 2012

Désobéissance civile



De retour après 2 jours au Salon du livre de Notre-Dame-du-Laus sans avoir accès à internet, je prends connaissance de la loi 78. Incrédule, je suis retourné lire l’article 5 de ma convention collective

En voici quelques phrases:

«5.01 L’autonomie universitaire par rapport aux gouvernements, aux corporations et aux autres institutions ou groupe d’intérêt est essentielle à l’accomplissement du rôle de l’Université.

5.03 Tout professeur est libre d'exprimer ses opinions personnelles à l'intérieur ou à l'extérieur de son lieu de travail, sans préjudice aucun aux droits et obligations rattachés à son statut et dans le respect de ses obligations professionnelles envers l'Université.

5.04 La liberté académique est le droit qui garantit l’accomplissement des fonctions professorales.

Elle comprend : (…) C) Le droit d’expression, incluant la critique de la société, des institutions, des doctrines, dogmes et opinions, notamment des règles et politiques universitaires, scientifiques ou gouvernementales.

La liberté académique est un droit fondamental des professeurs d’université parce qu’elle est nécessaire à la réalisation des finalités de l’institution universitaire.»

Je portais mon carré rouge en mars.
Je le porte en mai.
Je le porterai en août.

Désobéissance civile

vendredi 11 mai 2012

Prix Marc-Olivier Lavertu 2012

Les finalistes du Prix Marc-Olivier Lavertu 2012 (pour un album publié en 2011) décerné à un auteur québécois sont les suivants :

Jimmy Beaulieu, Comédie sentimentale pornographique, Delcourt.
Iris/Zviane, L'ostie d'chat, Tome 1, Delcourt.
Christian Quesnel, Cœurs d'argile, Premières lignes.

Ces finalistes ont été choisis par un comité d'étudiants et d'étudiantes en bande dessinée. Le vote se fera à l'automne et tous les étudiants et étudiantes inscrits en bande dessinée ont le droit de vote.

Une bourse de 250$ est offerte par le Plan B.

Le lauréat, ou les lauréates, sera invité à venir rencontrer les étudiants et les étudiantes à l'automne.

Rappelons que ce prix a déjà été remporté par :

Émilie Villeneuve et Julie Rocheleau pour La fille invisible, Glénat (2011);
Michel Rabagliati pour Paul à Québec, La Pastèque (2010);
Louis Rémillard pour Voyage en zone d'exploitation, Les 400 coups (2009);
Delaf et Dubuc pour Sale temps pour les moches, Les Nombrils, Tome 2, Dupuis (2008);
Leif Tande pour Wiliam, Mécanique générale (2007).

Bonne chance à tous.




mardi 8 mai 2012

L’homme sans cervelle



 Deux choses m’ont inspiré ce texte. Ce gag de Mafalda de Quino.

 Et cette phrase attribuée à Winston Churchill (traduite librement par moi) : «Celui qui n’est pas un libéral à 20 ans n’a pas de cœur; celui qui n’est pas conservateur à 40 ans, n’a pas de cerveau.»

J’ai toujours admiré Winston Churchill pour son sens de la répartie. Mais cette phrase, j’ai toujours su que je n’allais jamais y adhérer.

Je vais avoir 43 ans dans quelques jours et je constate que les idéaux et les valeurs que je défendais à 20 ans sont les mêmes qui m’habitent aujourd’hui. Après avoir énormément lu et m’être beaucoup informé ces dernières vingt années, force m’est de constater que les discours des lucides et des tenants du néolibéralisme n’ont jamais réussi à me convaincre de retourner ma veste.

Au contraire, je suis de plus en plus convaincu des iniquités de la société et du devoir de résistance qui en découle.

Si mon désir de justice social, mon envie de défendre les plus démunis, mon besoin de vouloir parler pour les sans-voix veulent dire que je suis sans cervelle, eh bien, je le revendique avec plaisir. À défaut de cervelle, j’ai toujours mon cœur de 20 ans.

Mais avec le cœur, vient une voix.

Se taire n’est pas une option

Maryse Gaudreault, la député de Hull au provincial, l’a dit : «Ce groupe de professeurs [Les profs contre la hausse] ne cherche qu’à politiser le débat et ce n’est pas leur rôle. Ces professeurs sont des employés de l’État, ils n’ont pas à se mêler de tout ça»  (Le Droit, 19 avril 2012, page 6).

Un professeur, partisan de la hausse, me l’a répété : «Nous avons le devoir de rester neutres».

Un autre collègue, chargé de cours dans un autre département, me l’a crié dans les corridors de l’Université «C’est de votre faute si les étudiants sont en grève!  Par vos actions, vous êtes responsables de tout cela». J’ai essayé de discuter, mais face à son ton agressif, j’ai abandonné la conversation. En le quittant, à mon «Bonne journée», il a répliqué : «Bonne journée ! Et enlevez immédiatement votre carré rouge!»

Rester neutre ? Se taire ? Je ne crois pas. En tant qu’intellectuels et professeurs d’université, il est de notre devoir, au contraire, d’intervenir dans l’espace public. Je le fais régulièrement en ce qui concerne la bande dessinée, mon champ de recherche, en collaborant avec les journaux, la radio et la télévision. 

Mais nous sommes également des citoyens et, de par notre position et notre capacité à réfléchir et à analyser, nous nous devons d’apporter notre voix aux débats de société. Comme l’a fait le sociologue Pierre Bourdieu lors des grèves en France en 1995.

Et lorsque ce débat concerne l’université et, surtout, son accessibilité et sa gérance, nous ne pouvons observer tout cela en restant cois. Nous sommes les premiers acteurs dans ce dossier et, à ce titre, nous avons le devoir, au contraire, de faire entendre nos voix.

Se taire ? Jamais !



jeudi 3 mai 2012

Un scénariste déprimé



 On pourrait résumer que le rôle d’un scénariste c’est d’organiser la matière narrative en un tout cohérent et, surtout, de prévoir la fin du récit. S’assurer que tous les éléments qu’il met en scène tendent vers une résolution. Je m’amuse souvent lors de la lecture d’un livre ou du visionnement d’un film à essayer de deviner la fin à partir des éléments qui me sont offerts en cours de récit.

Or, en regardant ce que l’on appelle «le conflit étudiant», il me semble de plus en plus deviner une certaine fin et cela m’inquiète. Il semble bien qu’il y ait un scénariste derrière la stratégie du Parti Libéral et il semble avoir mis la table afin de préparer des élections.

Ce parti va se dire incapable de résoudre le conflit à cause de l’intransigeance des étudiants et va s’en remettre à l’électorat afin que ce soit les électeurs qui décident du bien fondé ou du rejet de la hausse des frais de scolarité.

Or, il pourrait bien remporter les prochaines élections. On parlera moins de corruption et des dossiers qui ont entaché la crédibilité du Parti Libéral ces dernières années et Jean Charest se présentera comme celui ayant tenu tête aux têtes fortes et aux têtes folles estudiantines.

Et une grande partie de la population va le suivre sur ce sentier. Surtout ceux qui ne s’abreuvent qu’à certains médias traditionnels. Surtout qu’il ya en ce moment des nouvelles beaucoup plus importantes, tel l’embauche d’un nouveau directeur général pour le Canadien de Montréal. Un gouvernement libéral réélu aura alors beau jeu de dire qu'il a toujours eu raison dans ce conflit.

Quant aux étudiants, bien qu’ils soient nombreux, ils ne pèseront pas assez lourds dans la balance. Et tous ceux derrière le mouvement ? Les profs contre la hausse ? Les artistes contre la hausse ? Les intellectuels contre la hausse ? Les écrivains contre la hausse ? Une bande de barbus gauchistes qui n’auraient pas, de toute façon, voté pour le Parti Libéral. J’ironise. Alors, la stratégie me semble de plus en plus claire. Il y a vraiment un scénariste derrière tout cela.

Tout cela me déprime ce soir. Le goût amer d’avoir l’impression de faire le jeu du Parti Libéral. J’espère sincèrement me tromper. En attendant, pour me changer les idées, je vais aller écouter un peu de musique. Du Renaud, tiens. «Hexagone». Ça parle d’un certain mois de mai.

«Ils se souviennent au mois de mai
D’un sang qui coula rouge et noir
D’une révolution manquée
Qui faillit renverser l’histoire

Je me souviens surtout de ces moutons
Effrayés par la liberté
S’en allant voter par millions
Pour l’ordre et la sécurité»

Rien à faire. Toujours déprimé.